Étrange institut que voilà... Sans doute fallait-il une certaine persévérance pour oser concevoir l'idée même de réunir diverses bombes à retardement en un seul et unique lieu... Sharlay pensait aussi à l'hypothèse du traumatisme crânien après une mauvaise chute. Ne lui répétions pas assez d'imaginer tous les futurs possible ? Et bien certes, c'était faire preuve d'ironisme, voir d'humour décadent, mais pour une fois qu'elle écoutait ce qu'on lui disait ! Forcément du bourrage de crâne, au fait...
Un léger sourire en coin vint tracer une fine ligne sur ses traits, pour s'évanouir comme un souvenir d'enfant une demi seconde plus tard. Elle devait cesser d'être aussi émotive, aussi bien au niveau facial que mental...
Un pas, puis un autre. Les phalanges blanchis d'avoir trop serré les lanières de son premier et dernier sac, le regard levé vers l'immense façade avant de l'institut, elle ne bougeait plus. Reculer ? Avancer ? Non, ça aussi, elle l'avait répudiait. Inspiration, expiration. Surtout ne pas flancher, ne pas flancher, ne pas...
« Et zut ! »
S'en était trop ! Que pourrait-elle bien pouvoir faire au milieu de visages inconnus aux pouvoirs tous plus agressifs et dangereux les un que les autres ? Bon d'accord, c'est vrai qu'elle pourrait se contenter de survivre comme avant, de finir à l'état de carpette Welcome mi brûlé mi glacée mi électrocuté... Il faut bien partager ! Il faut croire que se retrouver au milieu de fanatiques ne l'enchantait guère, comparer son faible pouvoir à un don de destruction massive encore moins, et...
« Stop ! »
Elle se pinça l'arrête du nez entre le pouce et l'index et respira à nouveau un grand coup. Les piétons du coin allaient vraiment commencer à la prendre pour une folle alliée si elle continuait à parler toute seule ! Encore une fâcheuse habitude sans aboutissement. Sauf qu'elle avait maintenant l'habitude des impasses, et hésitait encore à entrer dans ce... ce... D'institut !
Qu'est-ce qui pouvait bien l'attacher autant au trottoir à ce point ?!? Elle se racla la gorge et se décida enfin à s'approcher ne serait-ce qu'un peu de ce grand portail imposant. Bon, et maintenant ? On invoquait le patriarche de l'Institut ? S'il s'était remis de son choc traumatique, bien entendu... Elle fouilla du regard l'entrée de verdure qu'elle pouvait apercevoir entre deux barreaux. Personne. Tiens, ça l'aurait étonné !
Elle caressa du bout des doigts l'immense grille en fer froid, courant sur les diverses griffures et rainures que le temps lui avaient imposés. Et justement, en parlant de temps, il ne devait pas être bien ancien... De toutes évidences, soit il était magistralement entretenu par les salariés de l'institut, soit il finissait régulièrement au sol de par le passage régulier des nouveaux et anciens mutants désirant faire un exemple de leur force... Elle opta avec parfaite lucidité pour la deuxième option. C'était beaucoup plus logique. Sur la pointe des pieds, accrochée aux longues barres de fer, sa voix claire et musicale résonna contre les murs avant que le silence ne reprenne ses droits...
« Il y a quelqu'un ? »
Nouveau soupir. Et elle se sentait parfaitement incapable de faire bouger ne serait-ce que de deux centimètres le barrage qui la séparait de sa nouvelle vie. Résigné à attendre la fin du monde, Shayr pivota sur ses talons et partis s'asseoir sur son sac, à quelques mètres de là. La tête contre le grillage, elle se maudit une fois de plus de n'être qu'humaine...
Quelqu'un finirait bien par passer !